Comme vont les oiseaux se poser sur des branches,
Sur moi je les ai vus, du lundi au dimanche,
Déposer leur fatigue ou mûrir leur espoir.
Sous leurs dehors divers, leurs idées parfois noires,
Sur mes planches assis tous étaient mes enfants,
Jamais je n’ai songé qu’ils étaient différents !
Combien en ai-je vu sur moi poser leurs fesses,
Des petites, jolies, ou des pleines de graisse ?
Peu m’importe aujourd’hui, je sais depuis toujours,
Qu’un homme qui s’assoie porte en lui quelque amour,
Qu’une femme qui vient en se tenant les reins,
Est lourde de l’enfant en santé dans son sein.
Chaque jour j’en ai bu des rires et des larmes,
Portant à bout de bras la fille emplie de charmes,
Ou le garçon ému qui n’osait lui parler.
J’ai révéré des gens qui sur moi s’écroulaient ;
Et ces vieux qui passaient chaque jour pour goûter,
Savent-ils quelle joie, quand leurs miettes tombaient,
Ils faisaient aux pigeons qui s’en gavaient sous moi ?
Je l’ai vu l’amoureux dont le cœur en émoi,
Faisait battre le mien dans mes planches de pin…
Puis lorsque la plus belle enfin toucha sa main,
Savez-vous que c’est moi, ravi, qui étais là ?
Le clochard endormi qui ne le pouvait pas,
Son costume troué, honteux quand un gardien
Le délogeait ainsi qu’on le ferait d’un chien…
Oui j’ai vu tout cela, je sais bien plus encore,
Pourtant je ne suis rien, juste un peu de bois mort !
Mais chacun son travail et même l’homme sombre,
En comptant son argent et ses soucis sans nombre,
Méritait de venir sur moi poser son cœur,
Pour contempler ce parc, ou murmurer j’ai peur…
Sébastien Broucke
26 juin 2013. 11h-12h.